Annoncé comme l’un des grands favoris de cette 24e La Boulangère Mini Transat dans la catégorie des Proto, Federico Waksman (1019 – Repremar – Shipping Agency Uruguay) n’a pas failli à son rang. En franchissant la ligne d’arrivée à 18h21 (heure de Paris) ce vendredi 10 novembre, le skipper a bouclé les 2 700 milles de l’étape 2 – Air Caraïbes entre Santa Cruz de La Palma et Saint-François en première position avec une avance de plus de 80 milles d’avance sur son dauphin, Carlos Manera Pascual (1081 – Xucla). Un écart qui lui permet de combler son retard de 4h14 cumulé à l’issue du premier acte et, par ricochet, de succéder à Pierre Le Roy au palmarès de l’épreuve (avant jury). L’Uruguayen, qui avait terminé 21e de la dernière édition en bateau de série, devient ainsi le premier représentant de son pays, le premier Sud-Américain et le septième étranger à réaliser une telle performance ! Ses premières impressions à chaud.
Vous terminez premier (avant jury) de cette deuxième étape mais aussi premier (toujours avant jury) de cette La Boulangère Mini Transat dans la catégorie des Proto. Que ressentez-vous ? « C’est incroyable. C’est le résultat de beaucoup de travail. Comme l’ensemble des autres concurrents, j’ai construit ce projet sur plusieurs années. Cela a été énormément d’investissement et autant de sacrifices. Participer à la Mini Transat ne se résume pas à barrer un bateau, c’est bien plus que cela. Après une première participation à la course en 2021, j’avais tiré de nombreuses leçons, que ce soit en sur le plan technique, sur le plan météo et sur une multitude d’autres points. J’ai progressé et amélioré beaucoup de choses. Je me suis clairement inscrit dans une démarche de performance et je suis clairement parti avec l’objectif de gagner. C’est chose faite a priori, et je ne pouvais pas espérer mieux. Je suis si content, si heureux ! »
Vous êtes parti des Canaries avec un débours de 4h14 sur le leader, Carlos Manera Pascual. De quelle manière avez-vous géré cette deuxième étape ? « Cet écart, c’était beaucoup et peu à la fois, à l’échelle d’une transatlantique. Je savais que je n’aurai pas le droit à l’erreur, notamment parce que Carlos allait assurément pousser fort. Je savais qu’il ne lâcherait rien et c’est d’ailleurs ce qu’il a fait. Pour espérer gagner, il fallait non seulement que je termine devant lui, mais aussi que je mette de la distance entre nous deux. Au final, j’ai réussi à faire le break et à garder 80 milles d’avance jusqu’à la fin. C’est amusant parce que pendant la course, lui et moi nous avons régulièrement communiqué par VHF. Nous avons échangé sur la stratégie de la course, discuté de nos choix respectifs… Je pense que l’un comme l’autre, nous sommes avant tout restés concentrés sur ce qui se passait à l’instant T, sans chercher à se projeter trop vite sur le résultat, ni à se marquer. La Mini Transat est une course d’endurance, à la fois pour les bonhommes et les bateaux et finir est toujours le premier but, même lorsque l’on vient pour gagner. »
Lors de cette étape vous avez imprimé un gros rythme et tenu des moyennes incroyables. Le niveau d’engagement a été énorme ! « Oui, je pense que l’on a tout bien tapé dedans. Pour ma part, j’arrive vraiment cuit. J’ai tout donné pour ne pas avoir de regret à l’arrivée. J’ai évidemment eu mon lot de petits pépins techniques. Lors des journées les plus ventées, j’ai cassé mon bout-dehors. Mon petit spi est alors tombé à l’eau et s’est coincé dans la dérive, cassant cette dernière dans sa partie basse. J’ai réussi à trouver une solution pour réparer le bout-dehors mais je n’ai ensuite plus eu d’autres choix que de naviguer sous spi max ce qui, au final, m’a peut-être aidé à être si rapide ! (Rires) »
Vous avez réalisé une saison 2023 remarquable puisque vous avez terminé systématiquement sur le podium des courses auxquelles vous avez participé. Et vous terminez sur cette victoire (avant jury) dans cette La Boulangère Mini Transat. C’est presque un sans-faute… « Oui, c’est juste fou ! Mes résultats sur les courses d’avant-saison m’ont donné le statut de favori mais cela m’a aussi mis une certaine pression sur les épaules. J’ai essayé de me détacher de tout ça mais ça n’a pas toujours été facile. J’ai été en tête toute la dernière semaine de course, mais je n’ai véritablement commencé à réaliser qu’à 250 milles de l’arrivée en Guadeloupe que ça sentait bon et que si je gérais bien ma fin de course, je filais tout droit vers la première place. De l’étape et du général. Bien sûr, j’ai une grosse pensée pour Carlos qui est mon ami et que je remercie d’avoir été un si bel adversaire. »
En 2021, vous aviez terminé à la 21e place chez les bateaux de Série, très déçu. On imagine que c’est, pour vous, une belle revanche, aujourd’hui ? « Complètement. Il y a deux ans, j’avais pleuré en franchissant la ligne d’arrivée. Cela a de nouveau été le cas cette fois, mais pas pour la même raison ! Je suis si heureux ! Si heureux ! Pour moi, c’est un véritable accomplissement. La Mini Transat, ce n’est pas juste une course contre les autres, c’est avant tout une épreuve contre soi-même. Il faut aller puiser dans ses ressources comme rarement, et même sans doute comme jamais. C’est un sentiment de fierté d’avoir réussi à mener ce projet à son terme. »